Le 28 octobre 1924, derrière la rue Winston Churchill, des hommes moustachus et funambules élévent la centrale thermique de Lomme Marais. Non loin de là, un navire de briques rouges est d'ores et déjà condamnée à l'errance. Quelques années plus tard, à l'occasion d'une aventure qui m'amena à découvrir le quartier de Lille-Fives, je m'intéressais plus particulièrement à l'usine Fives-Cail, ex-mère nourricière d'une bonne partie de la population locale. Accompagné d'un guide liquidateur, dernier salarié du site en charge du démantèlement-démembrement, je pénétrais l'enceinte d'acier, vidée de son sang, blanche et silencieuse.
Fives Cail, par les rails j'ai tracé
Une géographie de l'acier
Dans le sillage du chemin de fer
J'ai dépassé les frontières
Fives cail, passe-muraille, j'ai conquis
Les plateaux de Sibérie
Envoyé les gens au ciel
Dans les ascenseurs de Dame Eiffel
Sans jamais quitter mon atelier
J'ai voyagé
Ulysse jalouse mon odyssée
Mais lui on ne l'a pas oublié
Fives Cail, sur les eaux, j'ai marché
En jetant des ponts sur le Nil
Du vieux Danube jusqu'à Tancarville
J'ai rapproché plus d'une rive
Fives Cail, vingt mille lieux sous les mers
J'ai croisé tes chenilles ouvrières
Avalant les kilos de terre
Un vrai tapis pour le R.E.R
Sans jamais quitter mon atelier
J'ai voyagé
Ulysse jalouse mon odyssée
Mais lui on ne l'a pas oublié
Fives Cail, ça déraille en sourdine
T'as perdu les clefs de ton usine
Mais sous tes pieds, raisonne encore
Les marteaux-pilons, le bruit des forges
Les marteaux-pilons, le bruit des forges